Guy Mondineu


A propos des toiles de Philippe Planchet, Raymond Guidot écrivait :

« Ca commence presque toujours par un grand pan de noir arraché à la nuit et planté là comme unique décor de la scène future… »

Et de ce noir si puissant qu’il endeuille le soleil, jaillissent comme autant de fulgurations, des corps, des visages mutilés et balafrés…

Philippe Planchet, naît le 8 août 1952 à Nogent-sur-Seine. C’est à 15 ans qu’il découvre pour la première fois Michel Haaz. « Je découvrais un peintre, son atelier et son univers. J’entrais dans un autre espace, celui de la toile et son évolution, celui de l’image ».

Tout se précise en 1975 lors de son entrée aux Beaux Arts de Paris.

Ses premières recherches s’orientent autour du dessin.

« Cette poésie de la trace » le pousse à recréer une nouvelle harmonie dans les rapports avec la nature, l’homme et les objets, à réinventer et fabriquer un nouveau monde.

Déjà, sur un fond noir apparaissent des formes humaines capturées et plaquées sur l’ombre ; parfois, des organes : mains, œil ou sexe tentent de surgirent et de s’imposer comme choses vraies.

La découverte de l’Expressionnisme Allemand influencera profondément Philippe Planchet.

« Désormais » écrit-il  « il me semblait qu’ayant été en étroite complicité avec la nature, il me fallait l’être avec l’homme ».

Cette période sera pour Philippe Planchet une sorte d’autopsie plaine de remise en cause et de blessures.

Ce travail sur l’homme s’enrichit d’une recherche sur les supports : emploi de papier de différents grammages, emploi d’encre et de pigments.

Cette exploration de nouvelles techniques permet à Philippe Planchet de produire une série de portraits baptisés « reflets intérieurs de personnages », tableaux inspirés par l’entourage immédiat de l’artiste.

Enfin la suite logique de ce travail tout en progression nous amène à ces dernières œuvres : lavis et dessins marouflés sur toiles.

Désormais, la technique complexe et maîtrisée peut donner sa vraie place à la création pure de l’artiste et à sa vision personnelles du quotidien.

Philippe Planchet nous entraîne dans une atmosphère mystérieuse et  onirique.

Il nous séduit par ses traits appuyés servis par des couleurs à la fois fortes et subtiles.

De la nuit primordiale émergent des silhouettes torturées, malmenées et lacérées, qui s’imposent au spectateur comme autant de « coups de fouets reçus sur la rétine ».

Vulnérables, nues et corrodés avant même leur naissance, les ombres luttent avec les forces de la nuit et exhibent leurs plaies.

Triompheront-elles du mal ?

A travers ses tableaux, c’est le charme existentiel de la « fragilité de l’être » que tente de découvrir Philippe Planchet.

Témoin impuissant, il veut cependant nous alerter sur l’essence même de notre existence qui nous condamne -selon lui- irrémédiablement à la décrépitude et à la mort.

Visionnaire et spectateur lucide de notre comédie humaine, Philippe Planchet voue sa vie et son œuvre au même déroulement implacable :

« Je peins comme je vis et rien ne peut plus arrêter cette machine ».

Pourtant, ce témoignage inquiet sur la tragédie humaine reste plein d’espoir. Grâce à la lumière et aux pointes de couleurs ardentes qui transpercent l’obscurité, la vie, alors, peut, en effet, s’extirper de l’ombre.

 

Texte de Guy Mondineu, 1986

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :